In Memoriam




On le croyait immortel ...

Portrait Raymond Micha

  Sa silhouette semblait appartenir aux couloirs de l'Abbaye de Stavelot. Il nous avait habitués à être là, infatigable, toujours attentif à l'accueil des musiciens, mais aussi du public, adressant à l'un ou à l'autre un message de cordialité, évoquant l'émotion d'un concert, le talent d'un artiste. Certes les ans avaient laissé leurs traces, mais Raymond Micha continuait d'arpenter les dédales de l'Abbaye, assisté de sa canne bienveillante, avec une énergie inépuisable et ce sens inné de ce que l'on appelle aujourd'hui « les relations publiques » : il s'intéressait à tout le monde, serrait toutes les mains.

  Cet homme-là appartient à tous ceux qui, depuis près de cinquante ans, ont connu le Festival de Stavelot. Qui ne l'a pas salué, embrassé, remercié, félicité à l'une ou l'autre occasion ? Mais il se présentait toujours comme le modeste artisan de cette belle fête de la musique que fut chaque saison de concerts.

  Mais Raymond Micha était tout aussi conscient (et fier !) de ce que ce Festival de Stavelot représentait aux yeux et aux oreilles de son public. Le secret de cette réussite, c'était avant tout la chaleur humaine et la simplicité de son contact avec les artistes. Il leur témoignait toute son admiration et tout son respect, et considérait que l'accueil et la convivialité étaient les bases essentielles de la relation avec les musiciens. Et cette philosophie a porté ses fruits, ainsi qu'en témoigne la fidélité que les artistes et le public ont accordée à son festival.

  Le Festival de Stavelot est orphelin. Le Festival de Stavelot est en deuil. Mais, ainsi que le souhaitait son Président, le Festival est bien vivant, et il se prépare déjà à célébrer son cinquantième anniversaire que Raymond Micha évoquait très fréquemment dans ses derniers moments. Sa bonne humeur ne l'avait pas quitté, son verre de vin non plus… Il nous invite à continuer cette belle aventure dans la joie et dans l'amitié. Mais n'étant plus là, il ne pourra pas nous empêcher d'avoir toujours une pensée émue en souvenir d'un grand Ami, celui qui, du haut de son âge respectable, pouvait frapper sur l'épaule d'un gamin en lui disant: « Salut, vieux ! Comment vas-tu ? »

Jérôme Lejeune, juillet 2006      

      Raymond MICHA est décédé le 11 juillet 2006 en sa nonante-sixième année .


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Biographie :

( Telle que publiée dans le "Dictionnaire des compositeurs de Belgique", de Thierry LEVAUX, édité par le Conseil de la Musique de la Communauté Française de Belgique , aux éditions  ART IN BELGIUM   [ ISBN 2-930338-37-7 ] . )



MICHA Raymond

Compositeur, organiste, chef de choeur, chef de musique, pédagogue et organisateur de concerts né à Stavelot le 19 juin 1910. (Décédé à Stavelot le 11 juillet 2006.)

  La pratique musicale constitue une tradition ancienne de la famille Micha, et le père de Raymond, Octave (1879 - 1956), pianiste et compositeur a joué de son temps un rôle de premier plan dans la vie artistique de sa région : fondateur des Concerts Micha en 1916, il a créé en outre le Concours de violon François Prume en 1939, dont le premier lauréat fut Arthur Grumiaux (c'est d'ailleurs grâce au prix qu'il a remporté à cette occasion que ce dernier a pu s'acheter son premier violon valable!).
C'est avec son père et ses oncles que le jeune Raymond commence à apprendre la musique, puis il a la chance de recevoir les conseils de grands noms de l'époque séjournant l'été dans la région, Joseph Jongen, René Defossez et Fernand Quinet.
En 1933, il obtient le diplôme d'enseignement musical au jury central de l'état, et tout au long de sa carrière, il sera professeur de musique dans différentes écoles (à Spa, Malmedy, Stavelot et Liège).
En même temps, il aide son père dans l'organisation des Concerts Micha, se lance dans la direction de chorales et de sociétés d'harmonie, et se produit régulièrement comme organiste liturgique à Stavelot ou dans d'autres paroisses de la région.

  C'est en 1957 qu'est créé le Festival de Stavelot, à la mémoire de son père décédé l'année précédente. Consacré à la musique de chambre, il a lieu depuis lors tous les étés (son quarantième anniversaire a été célébré en 1997) et s'est acquis rapidement une réputation exceptionnelle par la qualité des concerts présentés (Arthur Grumiaux y a été un hôte assidu jusqu'à sa mort) et pour l'ambiance chaleureuse qui y règne.
Il a été aussi l'occasion pour Raymond Micha de nouer de nombreuses amitiés : tant le public que les artistes invités ont été chaque fois touchés par son enthousiasme, son dévouement et son engagement.
Son action lui a d'ailleurs valu de nombreuses distinctions officielles : nommé chevalier de Léopold, officier de Léopold II et citoyen d'honneur de la ville de Stavelot, il a reçu aussi les médailles de la presse musicale, de l'Unesco et de la SABAM.

  Comme compositeur, Raymond Micha ne s'est jamais voulu novateur. Les tendances actuelles de la musique le laissent, dit-il, "plus curieux qu'ému". Son langage se situe entre le romantisme et l'impressionnisme. S'il ne cherche pas l'originalité pour elle-même, ses oeuvres sont d'une écriture solide et séduisent par leur charme, leur raffinement, leur élégance, leur caractère chaleureux. Elles révèlent aussi une grande diversité expressive, passant de la tendresse à l'humour, de la nostalgie à la joie.
Leur auteur y chante la beauté de sa région, à laquelle il est passionnément attaché. Il en évoque parfois aussi le folklore. Assez varié, son catalogue comporte des oeuvres religieuses d'une réelle ferveur (trois messes, un Ave Maria pour choeur d'hommes et orgues, un Pater Noster pour choeur d'hommes a capella), des mélodies, des pièces profanes pour choeur (Fagnes de Wallonie, Ardennes, Foins, Crépuscule), de la musique de chambre (Vitrail pour cor et orgues, Prologue et Romanesque pour violon et piano, qui cite une danse ardennaise, Petit air de printemps pour clarinette et piano, basé sur le chant d'un merle), des pièces pour piano.
Une bonne partie de ses productions a été enregistrée, car nombreux sont les interprètes qui ont voulu mettre leur talent au service d'une musique sans prétention mais venue du coeur, et qui offre à notre époque un peu de sérénité qui lui manque tant.


Oeuvres publiées :


  • CHANT ET PIANO
    • Chant d'automne, de Charles Baudelaire
    • Invitation, de Maguy Thiry-Thiteux
    • A mi-voix, d' Adolphe Hardy
    • L'eau qui pleure, d' Adolphe Hardy
    • La brume du soir, d' André Van Hasselt
    • Chanson de la feuille morte, de Tristan Klingsor
    • Pâhûle Ardène, d' Emile Bertrand
    • Laetare, d' Alain Van Acht
  • QUINTETTES A VENT (Fl - Ob - Hrn - Cl - Fag)
    • Deux croquis rustiques
  • PIANO
    • Valse d'hiver
    • Dernières feuilles
    • Deux pastels
    • En demi-teintes (avec cordes ad lib.)
  • PIANO A QUATRE MAINS
    • Plein-air
    • Miniatures
  • ORGUE
    • Nocturne
    • Deux pièces pour grand orgue
  • VIOLON ET PIANO
    • Prologue et romanesque
    • Historiette (avec flûte et violoncelle ad lib.)
  • ALTO ET PIANO
    • Souvenances
  • VIOLONCELLE ET PIANO
    • Elégia
  • FLUTE ET PIANO
    • Cantilène
  • COR ET PIANO
    • Vitrail
  • TROMPETTE ET PIANO
    • Légende
  • CLARINETTE ET PIANO
    • Petit air de printemps
    • Andante-sostenuto
  • SAXOPHONE ET PIANO
    • Lied (alto)

Les oeuvres de Raymond Micha sont éditées chez BAYARD-NIZET , à Stavelot .