Illustrations


photo d'Octave Micha, Raymond Micha et Joseph Jongen

1 : Octave Micha
Raymond Micha
Joseph Jongen
(à Sart)


photo d'Arthur Grumiaux

2 : Arthur Grumiaux


photo Marcel HASTIR

3 : Marcel Hastir


Festival Musical de Stavelot

membre du Festival de Wallonie

Présentation

( Raymond MICHAavril 2006 )

HISTORIQUE :

Depuis que certaines églises ont ouvert leurs portes aux organisateurs de concerts, bon nombre de petits centres se voient ainsi nantis d'un cadre susceptible d'abriter d'importants ensembles musicaux. Avant cette innovation, Stavelot, bien que doté de plusieurs salles de fêtes, ne pouvait raisonnablement accueillir que des formations plus modestes sous le rapport du nombre. C'est donc tout naturellement vers la musique de chambre que mon père, Octave Micha 1, orienta les concerts qu'il fonda en 1916, concerts qui allaient porter son nom jusqu'à la naissance du festival actuel. Déjà avant la dernière guerre, plus de soixante Concerts Micha avaient été organisés avec la participation d'artistes réputés qui, appréciant l'oeuvre entreprise dans l'isolement et avec les moyens restreints de notre petite ville, lui apportèrent leur concours aussi précieux que désintéressé. Parmi eux, de remarquables interprètes liégeois, verviétois, spadois, ainsi que des amis qui, comme Joseph Jongen 1, Jean Rogister, Léon Van Hout, Ywan D'Archambeau, avaient une seconde résidence dans les environs immédiats.
Au répertoire de ces concerts, figuraient de nombreuses productions belges ainsi que des oeuvres maîtresses relativement récentes pour l'époque, comme le Quatuor de Maurice Ravel, joué à Stavelot en 1925, et celui de Claude Debussy, exécuté ici avec l'éminent altiste Léon Van Hout qui l'avait créé, en tant que membre du célèbre Quatuor Ysaye.

En 1939, mon père réunit quelques amis particulièrement attentifs à ses efforts artistiques et institua, avec leur aide, un concours de violon dénommé Prix François Prume en hommage à l'artiste stavelotain, décédé en 1849.
François Prume était de la pléiade de virtuoses - il joua avec Liszt et Mendelssohn - qui, au siècle dernier, firent la réputation de l'École belge du Violon, reconnue dans le monde entier.
Brillamment remporté par Arthur Grumiaux 2, ce premier concours fut malheureusement troublé par la mobilisation et plusieurs candidats se virent remettre leur «ordre de rejoindre» en pleine épreuve. Pendant la guerre, les organisateurs ayant pu rester à Stavelot se retrouvèrent pour préparer l'avenir.

Sur les instances de mon père, ils décidèrent la création d'un cercle d'art qui, prolongeant le concours de violon, prendrait le nom de Cercle François Prume. Celui-ci englobait les Concerts Micha et devait étendre son champ d'action à des expositions d'art, à des conférences, à des cours de musique et de dessin. Meublant utilement - et avec toute la discrétion voulue - les loisirs nés de l'occupation, la nouvelle association devait voir son matériel, très péniblement acquis, anéanti par l'offensive des Ardennes de décembre 1944, si tragique pour de nombreux concitoyens. Ce drame paralysa, pour un temps relativement long, les préoccupations artistiques qui s'effaçaient évidemment devant d'autres douloureuses et impérieuses nécessités. Ce fut donc d'une manière très sporadique que le Cercle François Prume manifesta son existence et que mon père reprit l'initiative des quelques concerts qui allaient précéder son décès, survenu en 1956.
Qu'il me soit permis d'évoquer ici un souvenir personnel : en 1931, en permission de service militaire, j'accompagnai mon père dans une de ses promenades favorites le long de l'Amblève. Me prenant par le bras, il me déclara, avec une frappante assurance, que les sonates et quatuors rempliraient un jour les salles de la ville, parce que la musique de chambre trouverait toujours un argument de succès dans l'environnement de notre ancienne abbaye et que, d'ailleurs, on respirait à Stavelot «UN AIR DE FESTIVAL» !

Aujourd'hui, grâce à des pouvoirs publics compréhensifs et sous l'impulsion d'une équipe d'organisateurs dont on ne dira jamais assez les mérites, la musique de chambre rayonne non plus à partir de l'environnement, mais du coeur même de la vieille abbaye où elle a trouvé un cadre incomparable. Et cette musique, destinée il y a près de cent ans par Octave Micha à son fidèle mais petit auditoire local, est maintenant dispensée par les plus grands interprètes belges et étrangers à un public de plus en plus important et venant de partout, pour assister à un festival auquel on se plaît à reconnaître un caractère authentiquement international.
Sur ce plan, le concours de la Radio Télévision belge ( actuellement : Musiq3 ) aura été déterminant.

Avant d'aborder le sujet du Festival proprement dit, il paraît intéressant de revenir à quelques événements ou manifestations artistiques qui, ayant jalonné la période s'étendant de la fondation du Cercle François Prume au décès de mon père, ont inspiré, avec la Semaine Musicale de 1957, l'instauration officielle du Festival de Stavelot.
Si, comme je l'ai déjà signalé, l'activité artistique est restée plus ou moins en veilleuse dans l'immédiate après-guerre, c'est l'organisation du deuxième Prix François Prume, en 1949, qui contribua pour une grande part à ranimer la flamme.
Après Arthur Grumiaux en 1939, Marcel Debot fut le lauréat très remarqué de ce deuxième concours qui avait attiré chez nous un large auditoire où se comptaient de nombreux étrangers. Les échos du Prix François Prume de 1939 furent étouffés par la gravité de la situation internationale. Ceux du concours de 1949 eurent, en revanche, et grâce surtout à l'intervention de la presse et de la radio, un retentissement décisif pour le renom culturel de Stavelot. Néanmoins, une troisième édition de cette épreuve, tentée en 1951 et remportée par André Cauvin, devait être la dernière, les concurrents faisant défaut... Parallèlement à ces manifestations, le Cercle François Prume proposa plusieurs expositions d'art ainsi que des conférences qui furent toutes fort bien suivies. C'est à la suite du décès d'Octave Micha que ses amis et collaborateurs eurent la délicatesse de dédier à sa mémoire une émouvante Semaine Musicale qui se déroula en l'ancienne abbaye, au cours de l'été 1957.
A cette occasion, j'eus la faveur de pouvoir compter sur l'amitié et l'expérience de Marcel Hastir 3, directeur de l'Atelier de Bruxelles, avec qui fut élaborée, pour la première fois chez nous, une série ininterrompue de sept concerts du soir. Ceux-ci devaient être précédés par une séance d'hommage au cours de laquelle fut inauguré un fort beau mémorial dû au talent du Vicomte Jacques de Biolley. Ce fut au cours de cette Semaine Musicale que fut annoncée officiellement la création du Festival de Stavelot.

Celui-ci naissait dans un climat favorable à plus d'un titre : accueilli dans une salle et des dépendances exceptionnelles, ses voies déjà préparées par l'importante expérience qui l'avait précédé, assuré de l'inlassable dévouement de ceux qui venaient de le mettre au monde, notre rendez-vous musical d'été entrait avec un raisonnable optimisme, dans la grande aventure...

En 1971, un événement majeur donna une envergure nouvelle à notre festival : la création du Festival de Wallonie qui regroupait les différents acteurs de la vie musicale de toute cette région.

PS :
En même temps que les festivals de Liège et de Saint-Hubert, celui de Stavelot entreprend en 2008 sa cinquante-et-unième saison.